Trois avalanches se sont déclenchées ce mardi 23 février 2016 vers 12h30 dans un secteur hors-piste de Ceillac dans le Queyras. L'une d'entre elle a emporté 3 skieurs sur un groupe de 23 skieurs appartenant au CAF d'Albertville. Deux d’entre elles sont indemnes et une femme de 59 ans, qui était en arrêt cardio-respiratoire, est décédée à l’hôpital de Briançon où elle avait été évacuée par les gendarmes du PGHM de Briançon. Localisation Sur la commune de Ceillac, premiers contreforts au Nord du Pic des Heuvières. Sous la pointe cotée 2766m (carte IGN 1.25000). L'altitude de l'accident est de 2450 mètres. Public concerné Un groupe de 23 skieurs appartenant au Club Alpin Français d’Albertville. Il n’y avait pas de professionnel de la montagne avec eux. Conditions météorologiquesLe jour de la sortie, le temps était couvert avec parfois des éclaircies. La visibilité était parfois réduite (jour blanc). La veille de la sortie, il a plu au village jusqu’à tard dans la nuit, Les températures étaient vraiment douces (8 à 10°C au village en journée). La pluie est tombée jusqu’à 2000m d’altitude. Il n’y a pas eu de regel au village durant la nuit du lundi au mardi. A l'altitude de l’accident (environ 2500 m), il est tombé 15 cm de neige durant la nuit. Lundi, le vent a aussi été présent et il a été assez fort en altitude (vent du Sud/Sud Ouest apportant cette couche de sable). Mardi, c’était un vent météo Nord Ouest qui a été lui aussi assez fort, surtout en altitude. Les accumulations de neige par le vent (congères notamment) sont bien visibles notamment dans le secteur où a eu lieu l’avalanche. On notera donc une surcharge naturelle du manteau neigeux (apport de neige nouvelle par le vent et par les précipitations). Conditions nivologiques Risque 3 marqué au dessus de 2200m. Le manteau neigeux s’est bien tassé dimanche avec ce fort redoux puis par les précipitations de lundi. Malgré cela, l’endroit où a eu lieu l’accident, plein Nord, est resté froid surtout lors du début de l’hiver. Début d’hiver avec très peu de neige, fort rayonnement donc fort gradient de température qui a transformé (métamorphose constructive) cette première couche de neige en grains sans cohésion. Cette couche se situant à la base du manteau neigeux (interface sol/neige), constitue une véritable couche fragile : un pan de glissement idéal à une avalanche de plaque. Des avalanches de mêmes types, sur les mêmes orientations ont auparavant eu lieu dans le cirque de la Font Sancte et sous la chaîne des Veyres. Description de l'avalanche Trois avalanches de plaques dont une qui a emporté 3 skieurs lors de leurs descentes. Ces avalanches sont orientées au Nord pour les deux plus petites et NNO pour la plus importante. Ce sont des pentes dites « froides » qui n’ont pas eu le temps de se stabiliser. La pente au niveau des lignes de rupture est raide (>30°). Le manteau neigeux est parti sur toute sont épaisseur à la faveur d’une couche fragile composé de grains sans aucune cohésion (type gobelets). Cette couche de neige située à la base du manteau neigeux s’est formée par fort gradient de température (conditions froide du début d’hiver, avec fort rayonnement ; remarquable lors d'un test avec bâton dans les pentes de secteur Nord). Cette couche fragile a une épaisseur variable (10 cm lors d’un sondage à proximité). Synthèse La trace de montée a été faite depuis le pied des pistes, remontant les abords de la piste de Girardin, puis par la piste bleue jusqu’à sortir des pistes en passant par la bergerie des Preynasses (2218m). Le groupe est ensuite passé en rive gauche de la piste rouge des Fontinets en évoluant dans un milieu forestier clairsemé traversant le premier couloir issu du sommet de la crête morainique cotée 2423m (IGN). Ils ont pu traversée ensuite une zone boisée jusqu’à traverser en pleine pente le Nord de la moraine cotée 2427m (IGN). Après avoir traversé la base des larges pentes issues des contreforts Nords des Heuvières, ils se sont retrouvés dans un petit vallon menant au collet au Sud de la pointe cotée 2520m (IGN). Le groupe a eu de la chance qu’il n y ait pas plus de victimes. L’avalanche s’est déclenchée à la descente et fort heureusement (descente identique de celle de la montée). Il faut savoir qu’on sollicite plus le manteau neigeux à la descente qu’à la montée. En plus, il faut ajouter à cela que le groupe est très important (plus de 20 skieurs), ce qui est énorme et qui sollicite d’autant plus le manteau neigeux. La trace à la montée n'est pas du tout pertinente. Elle traverse notamment la moraine cotée 2427m (IGN) dont la pente est supérieure à 30° (la majorité des avalanches partent au delà de ce seuil). Il aurait donc mieux fallu contourner cette moraine, ce qui était largement faisable. L’endroit n’est pas du tout propice pour faire une randonnée à ski en cette période : 1. passage sur et en contrebas de pentes supérieures à 30° 2. surcharge naturelle du manteau neigeux : 15 cm de neige fraiche 3. fort épisode de transport de neige par le vent 4. fort redoux (réchauffement) lors des deux derniers jours 5. présence d’une couche fragile décelable (test du bâton) à la base du manteau neigeux 6. présence de congères (largement visibles) 7. mauvaise visibilité 8. risque d’avalanche marqué : 3 sur une échelle de 5 Tous les paramètres sont au « rouge » sur ce choix d'itinéraire et les conditions lors de la rando. Dans la méthode de vigilance encadré, nous sommes en "mode hasardeux". Le leader du groupe aurait dû prendre conseil auprès de professionnels de la montagne (pisteurs, guides, moniteurs). D’autant plus que la veille de la sortie, il y avait une conférence sur la gestion du risque d’avalanche à Ceillac réalisé par un guide de haute montagne de Ceillac (le groupe de skieurs avait comme base le gîte les Balladins à Ceillac).
15 Commentaires
Favier Roger
13/3/2016 08:29:29
Bravo Sébastien ! Ton explication est très claire ...
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Audrey jean
13/3/2016 08:41:35
Bonjour, la veille nous avons donc assisté à une des conférences de Sebastien! Et la conclusion du soir était pui demain il y a de grosses chances d'avalanches !!!
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13/3/2016 20:54:33
Felicitations Sebastien, ton explication est tres claire. Celle d'un pro de la montagne. Comment faire pour aviser les responsables de vies humaines qu'ils doivent prendre toutes les precations possibles avant de s'engager dans des courses en montagne presentant des risques? Tres difficile. Faut-il obliger les groupes a prendre obligatoirement un guide de montagne?
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antoine
14/3/2016 10:04:03
Salut Seb,
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sebdescimes
14/3/2016 18:16:25
Bonjour Antoine.
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Patrick
14/3/2016 11:53:18
Dommage qu'un futur guide publie une telle analyse ! Que tu fasses ton analyse perso et que en parle au bistrot du coin soit. Mais que tu publies sur la toile un ramassi de lieux communs sur le fait qu'il n'y ai pas de pro avec eux, groupe très important (tu ne sais absolument pas comment était composé ce groupe de 23 skieurs), je passe et des meilleurs.
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sebdescimes
14/3/2016 17:36:07
Bonjour Patrick,
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christian 73
14/3/2016 21:00:33
Bonjour déclenchement a distance plaque friable et gobelet plus redoux pas mal de circonstance a avoir un problème ,pour le gobelet on le retrouve dans pas mal de massif au nord ,normal un début d'hiver sans neige ou peu de neige qui suis d'un beau temps pendant quelques jours température de l'air froide avec un sol chaud réaction chimique , fort gradient et le peu de neige qu' il a eu au début de l'hiver c'est transformé en gobelet sous couche fragile , bien lire le bulletin nivo et surtout le comprendre et voir les antécédents du début de saison peu éviter des dégâts et surtout limiter le nombres de randonneurs dans une collective peut être avec moins de participants cela aurait pu passer en s'espacent bien sure moins de monde moins de chance de surcharge et de déclenchement a distance , très bien votre rapport...
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Jeroen
15/3/2016 01:51:17
Bonjour Seb, j'étais aussi sur place ce jour là, pas très loin, aussi en rando, et je tiens à apporter mon ressenti.
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christian 73
15/3/2016 10:34:21
Pour Jeroen , je ne parle pas de plaque a vent je parle de plaque friable rien a voir , la neige qui est tombée la vieille ou dans la nuit n a pas adhéré a l ancien manteau neigeux et ses plaques friables se déclenchent facilement a distance plus la neige pourrie dessous ca fait des quantité et puis je ne fait pas un procès au groupe surtout pas je les connais ,mais quand t il y a un accident d avalanche savoir réellement le problème peu avertir d autre personnes et c est sure , la nivo n est pas une science exact mais je trouve qu' a notre époque par rapport a la mienne il y a pas mal d années , on peut y faire confiance mais comme je dit souvent il faut comprendre le contenu qui n est pas a la porté de tout le monde moi aussi il y a longtemps je me suis fait prendre dans une plaque friable j ai eu de la change pour eux il n ont pas eu de change mon principe même ci avant c était mon boulot pendant quelques années la nivo je n'ai jamais confiance au manteau neigeux alors toujours réfléchir avant d'engager un groupe et un dernier point adapter la rando par rapport au condition de neige ...
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Bast
15/3/2016 10:38:57
"Il faut savoir qu’on sollicite plus le manteau neigeux à la descente qu’à la montée. En plus, il faut ajouter à cela que le groupe est très important (plus de 20 skieurs), ce qui est énorme et qui sollicite d’autant plus le manteau neigeux."
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christian73
15/3/2016 13:01:40
je suis bien d accord le poids d un skieur a la descend sollicite le manteau neigeux beaucoup plus qu' a la monté qui est plus douce il y a moins de vibration dans les couches et avec le nombre il faut multiplier par je crois 23 randonneurs , pour les plaques a vents c est pareille que pour les plaques friables mais dans tout ca ils n ont pas eu de change
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Bast
15/3/2016 13:32:45
Faut arrêter un peu les mythes : les vibrations dans les couches de neige (avec une "sollicitation" statique?), la multiplication par 23 (linéarité du comportement mécanique de la neige?), etc... ca n'a aucun sens mécanique. Alors avant d'affirmer n'importe quoi, relisez un peu des bouqins et des papiers. Plus de commentaires ici : http://www.camptocamp.org/forums/viewtopic.php?pid=2168384#p2168384
christian 73
15/3/2016 18:07:00
je regrette un virage sauté je ne m en rappelle plus mais double la surcharge faut regarder les bouquins comme vous dites ,et beaucoup ne croient pas au déclanchement a distance ,un exemple le c a f il y a quelques années un groupe de skieurs ont fait partir une plaque a vent bien au-dessus d'eux , manteau très instable plusieurs personnes ensevelis mais juste blessée d'ailleurs le maire de celliers a refusé de payer la note des secours je m'en rappelle le risque était assez élevé l accident s était produit a un endroit ou l on passe sous de grande pentes ....pourtant course peux risqué mais il y a quand même un passage a risque en cas de nivo élevé...
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christian73
15/3/2016 18:29:45
En conclusion ils n ont pas eu de chance
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